LE MODELE ECONOMIQUE AMERICAIN : CARACTERISTIQUES ET PROBLEMES
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INTRODUCTION : Avec 24,6% du PIB mondial en 2010, les Etats-Unis d’Amérique sont, de loin, la première puissance économique du monde. Cette hégémonie est manifeste aussi bien dans l’agriculture, dans l’industrie, dans les services que dans les sciences et les techniques. La prépondérance des USA qui s’est surtout affirmée, au lendemain de la seconde guerre mondiale, repose sur un modèle de développement socio-économique bâti sur les principes du capitalisme libéral.
Ce modèle qui a produit la première puissance économique du monde est un système aux caractéristiques originales mais confronté à des problèmes de nature variée.
I- UNE PLACE DE PREMIERE PUISSANCE ECONOMIQUE DU MONDE, EXPRESSION D’UN MODELE DE PERFORMANCES.
Les Etats-Unis détiennent, dans le système économique mondial, une place de choix. En effet, ils disposent des ressources naturelles immenses, la première agriculture et la première industrie au monde et sont leaders dans de nombreux secteurs des activités de services (y compris les sciences et les techniques).
1) Des ressources naturelles immenses.
La nation américaine bénéficie d’un immense patrimoine agricole et forestier (voir leçon 2). En plus, le sous-sol étasunien regorge d’une gamme quasi-complète des ressources minières, minéralières et énergétiques. C’est ainsi que les USA sont la 2e puissance minière au monde derrière la Russie. A ce titre, ils occupent la première place pour de nombreux produits agricoles, miniers et énergétiques : 1e rang pour le bois, le mais et l’électricité nucléaire, entre autres, 2e rang pour les oranges, les porcins, le cuivre, le gaz naturel, le charbon, les phosphates, l’or et 3e place pour le plomb, le pétrole, les bovins et le blé.
La mise en valeur de ces gigantesques potentialités est facilitée par des réseaux impressionnants de transport et de communication parmi les plus performants au monde.
2) La première agriculture du monde.
Jadis organisée en « belts », la géographie agricole des USA est de plus en plus caractérisée par une diversification et une modernisation poussées mais aussi par une haute productivité. Cette modernisation se manifeste par une mécanisation et une motorisation impressionnantes, une consommation importante d’engrais et de produits phytosanitaires, par l’apport d’une recherche agronomique performante et par un recours sans cesse accru à l’agriculture biologique. En conséquence, le nombre d’actifs dans le secteur décline avec, cependant, une productivité qui augmente régulièrement.
Cette agriculture a, ainsi, engendré le développement du sous secteur de l’agrobusiness avec un complexe agroindustriel qui emploie plusieurs millions de personnes.
Enfin, l’agriculture américaine qui exporte plus du quart de sa production et qui compte ainsi pour beaucoup dans l’approvisionnement mondial en nourriture sert également d’arme à la superpuissance mondiale : c’est la diplomatie du « FOOD POWER ».
3) La première puissance industrielle du monde.
Avec près de 30% de la production industrielle des PID, l’industrie étasunienne est de loin la première au monde. Elle détient, ainsi, des positions primordiales dans de nombreux secteurs comme la chimie, l’agroalimentaire, l’informatique, l’aéronautique et l’aérospatial. C’est également une industrie fortement mondialisée à la faveur des délocalisations.
Par ailleurs, au sein de l’espace national, la carte industrielle des USA s’est modifiée considérablement au profit du Croissant périphérique (la SUNBELT et les Etats d’Oregon et de Washington, au Nord de la Californie), à la faveur du dynamisme général qui caractérise les façades du Pacifique et la Mexamérique. Cela traduit également le passage des industries américaines du FORDISME (système de production caractérisé par la concentration géographique, la taylorisation et la production en masse) au POST-FORDISME (dispersion géographique des entreprises et leur éclatement en PME).
Par ailleurs, la puissance agricole et industrielle des USA va de pair avec un leadership incontestable dans le domaine des services : bourses de valeurs, banques, transports, communications, tourisme, recherche-développement, commerce, etc.
En somme, les Etats-Unis regorgent de potentialités immenses et d’une puissance agricole, industrielle et commerciale incomparable. Cette prépondérance de l’économie américaine est, en grande partie, le résultat d’un modèle de développement économique aux caractéristiques spécifiques.
II- UN MODELE ECONOMIQUE AUX CARACTERISTIQUES ORIGINALES.
1) Un modèle bâti sur les principes du capitalisme libéral.
A plusieurs égards, les USA constituent un bel exemple de réussite d’un modèle de développement reposant sur le capitalisme libéral. En effet, le système politique et juridique des USA assure la liberté d’entreprise, la propriété privée, la libre concurrence et le profit. Ces règles sont d’ailleurs érigées à la hauteur du mythe chez les Américains. Ces derniers sont très attachés à ces principes qui constituent, pour eux, les gages du progrès, de la liberté et du développement.
2) Des structures économiques géantes et en perpétuelle recomposition.
Les Etats-Unis détiennent plusieurs dizaines de millions d’entreprises de toutes tailles.
Ces dernières sont d’abord caractérisées par une dynamique permanente de créations (avec près de 100.000 à 700.000 PME créées chaque année), de disparitions, de fusions ou d’absorptions pures et simples. Cette situation est l’expression même de la dure loi du « GO AND STOP » autrement dit cette succession accélérée de phases de dépressions et de périodes de reprises qui caractérisent l’économie américaine.
Les structures économiques des USA sont également symbolisées par leur gigantisme, fruit de concentrations de nature variée. Il s’agit, ainsi, du « BIG BUSINESS » qui concerne surtout les secteurs exigeant une capitalisation élevée comme le pétrole, l’automobile, la chimie, les banques et l’agriculture. Ces géants de l’économie américaine voire mondiale sont toutes cotés en bourses d’où la possession de capitaux importants et diversifiés.
Ces sociétés géantes existent sous deux principales formes.
La première concerne les conglomérats qui sont le résultat d’une absorption d’entreprises engagées dans des secteurs différents. C’est le cas de GENERAL MOTORS dont l’activité économique initiale était l’automobile et qui a élargi ses domaines d’intervention dans l’aéronautique et l’électronique.
La seconde forme correspond aux oligopoles c’est-à-dire de véritables groupes monopolisant un secteur déterminé. Tel est l’exemple de la firme BOEING qui domine le marché aéronautique.
Par ailleurs, l’une des facettes des structures économiques américaines est leur internationalisation très poussée. En effet, leurs FTN ou FMN sont presque présentes partout dans le monde, à travers leurs filiales. Ces dernières sont l’expression des nouvelles stratégies économiques mises en place en vue de faire face à un besoin pressant de marchés de consommateurs plus élargis, de matières premières et de main-d’œuvre bon marché. C’est aussi une politique destinée à mieux résister à la rude concurrence des autres PID et des pays émergents.
Enfin, les structures économiques américaines sont caractérisées par le nombre impressionnant des PME et PMI (travaillant avec les grosses entreprises dans le cadre de la sous-traitance) mais aussi par leur forte implication dans le financement de la recherche en partenariat avec l’Etat fédéral.
2) Un Etat fédéral de plus en plus présent et régulateur du jeu économique.
Contrairement à beaucoup de nations du monde capitaliste, l’Etat fédéral américain ne contrôle pas des secteurs de production excepté le secteur stratégique de l’aérospatial avec la NASA. Cependant, depuis le « NEW DEAL » de Roosevelt des années trente, l’Etat américain intervient de plus en plus dans la régulation et ou la marche de l’économie nationale.
Ainsi, par le biais de la Banque Fédérale, l’Etat initie des politiques de stabilité et de croissance économique. En effet, par sa politique budgétaire (ajustement des taxes à la consommation et des impôts) ou sa politique monétaire (gestion de la masse monétaire et du crédit), il peut accélérer ou ralentir la croissance économique.
Ensuite, l’Etat règlemente et contrôle le jeu économique. C’est ainsi qu’il peut intervenir pour que les prix ne montent pas au-delà d’un niveau de profit raisonnable ou en mettant en branle la loi antitrust qui permet de casser les monopoles.
En outre, par ses services directs, l’Etat américain participe à la production et parfois la stimule. Il assure la défense nationale, l’exploration spatiale et finance le secteur de la recherche-développement à hauteur de 40 ou 50% selon les circonstances. Ces deux secteurs constituent ainsi les piliers fondamentaux de la haute technologie. Par ses commandes colossales, il stimule la production dans plusieurs secteurs comme le complexe militaro-industriel.
Parallèlement, l’Etat apporte son aide aux secteurs économiques en difficultés ou souvent à certaines catégories sociales : subventions aux agriculteurs ou aux PME, aides sociales aux pauvres, bourses aux étudiants, couverture médicale pour les démunies (Medicaid) et les personnes âgées ou handicapées (Medicare) C’est dans ce cadre que, face à la crise financière et économique qui a secoué l’hyper puissance en 2008 et 2009, le Président BARACK OBAMA a mis sur pied, en février 2009, un nouveau plan de relance de l’économie américaine (AMERICAN RECOVERY AND REINVESTMENT ACT), d’un montant de 787 milliards de dollars, (en remplacement du Plan PAULSON de Georges W. Bush). Ce « stimulus plan » comporte trois axes prioritaires : réduction d’impôts pour les ménages (38%), dépenses sociales (38%) et dépenses d’investissement (24%). C’est ainsi que la reprise économique a été amorcée en 2010 avec un taux de croissance du PIB de 3,1% contre -2,4% en 2009. Enfin, l’Etat fédéral qui détient des pouvoirs importants en matière de politique énergétique, défend l’environnement national comme l’atteste la Loi sur l’Air Pur ou « CLEAN AIR ACT ».
En gros, les Etats-Unis ont bâti un modèle économique régi par les principes du capitalisme libéral et caractérisé par le gigantisme et la dynamique permanente des entreprises, par un rôle de régulateur du jeu économique de l’Etat fédéral et par une mondialisation très poussée des structures économiques. Ce modèle très original est confronté, cependant, à certains problèmes.
III- LES PROBLEMES DU MODELE DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE DES USA.
Malgré son avance incontestable sur les autres pays du monde, pris isolément, l’économie de la superpuissance mondiale est confrontée à des difficultés multiformes qui expriment, ainsi, les limites du modèle américain.
1) Une dépendance énergétique défavorable à la compétitivité.
Les USA sont de loin les premiers producteurs et consommateurs d’énergie dans le monde. Ainsi, en 2009, la production totale d’énergie s’élevait à 1707,261 millions de tep et la consommation totale à 2292,869 millions de tep soit un taux de dépendance énergétique de près de 25,54%. Ce bilan énergétique chroniquement déficitaire s’explique par un souci de préservation des réserves nationales et une forte demande doublée d’une surconsommation voire d’un gaspillage énergétique. Alors, les USA ont-ils un des quotients énergétiques des plus élevés au monde avec 7,473tep / hab. en 2009. Par conséquent, les importations massives de produits énergétiques pétroliers participent à rehausser les coûts de production et à porter un coup sérieux à la compétitivité des produits américains.
2) Le poids des « déficits jumeaux » et de l’endettement.
Depuis le début des années 1970, l’économie américaine montre certaines limites du modèle libéral à travers les déficits jumeaux : le déficit budgétaire et le déficit commercial.
Tout d’abord, le déficit budgétaire fédéral résulte d’un déséquilibre né de certaines dépenses sociales mais aussi et surtout des dépenses militaires consacrées à la course aux armements en périodes de guerre froide ou à des opérations armées très coûteuses comme présentement en Afghanistan et en Irak.
C’est ainsi que ce déficit qui était à 370 milliards de dollars en 2003 est passé en 2008 à 1800 milliards de dollars. Dès lors, l’Etat fédéral est obligé de s’endetter en lançant des bons du trésor qu’achètent les fortunés américains, asiatiques et européens mais aussi les banques centrales des pays asiatiques ( le Japon en détient en 2011 plus de 700 milliards et la Chine plus de 800 milliards grâce aux excédents dégagés du commerce avec les Etats-Unis). Les USA sont, ainsi, les premiers débiteurs au monde avec une dette évaluée à 14.240 milliards de $ en 2011. D’où une crise de l’endettement ayant engendré la dégradation de la note de confiance de l’économie américaine de AAA à AA.
Ensuite, le déficit commercial, quasiment chronique depuis 1975, est aussi un problème auquel est confrontée l’économie américaine. Ainsi, la balance des paiements est-elle déficitaire de 378,4 milliards de dollars en 2009. Ce déficit s’explique par la réduction des parts américaines en valeur relative dans le marché mondial, l’invasion du marché étasunien par des produits japonais, européens et d’autres pays émergents et l’appréciation du dollar par rapport aux autres monnaies. Toutefois, la gravité de ce déficit est atténuée par le fait qu’une bonne partie des importations américaines provient d’entreprises filiales des FMN et FTN des USA dispersées presque partout dans l’espace mondial.
En bref, les déficits jumeaux et l’endettement fragilisent davantage l’économie de la superpuissance qui perd ainsi, progressivement, sa place de premier foyer d’accueil et de refuge de devises étrangères au profit de la zone euro..
3) Précarisation de l’emploi et paupérisation de certains travailleurs.
Aux Etats-Unis, depuis la fin des Trente glorieuses, on assiste, avec la montée du chômage (même si celui-ci évolue en dents de scie et avec un taux de près de 8,6% des actifs en fin 2011), à l’affaiblissement des syndicats.
En plus, dans ce pays, contrairement aux autres nations du Nord, il n’existe pas de SMIC (Salaire Minimum Interprofessionnel de croissance). L’organisation du travail est, alors, fondée sur la flexibilité, conformément aux principes du libéralisme. De ce fait, les charges patronales vis à vis des employés sont réduites et la couverture sanitaire est faible sinon inexistante.
Cette flexibilité de l’emploi et les politiques de délocalisations des industries et des services expliquent la précarité de l’emploi et des conditions de vie des travailleurs (surtout les non qualifiés). Ces derniers, victimes de la baisse des salaires, se paupérisent et sont très souvent obligés de recourir à plusieurs jobs. Selon certaines statistiques, on dénombre près de 49 millions de pauvres aux USA en 2011 ; un véritable paradoxe pour la première économie du monde.
Ainsi, le déficit budgétaire et commercial chronique des USA, leur endettement exorbitant et la paupérisation des travailleurs constituent les principaux problèmes du modèle de développement socio-économique américain.
CONCLUSION : La place primordiale des Etats-Unis est la résultante de facteurs historiques mais aussi et surtout de caractéristiques très originales de leur modèle de développement socio-économique. Ces caractéristiques sont un capitalisme libéral garantissant la concurrence et la créativité, le gigantisme et l’internationalisation des entreprises américaines mais aussi un Etat fédéral régulateur du jeu économique, aux destinées d’une société à haut niveau de vie résolument tournée vers la consommation
Néanmoins, ce modèle montre certaines faiblesses principalement la vulnérabilité des travailleurs, les déficits jumeaux (commercial et budgétaire), le poids d’une dette exorbitante et de la dépendance énergétique. Ces problèmes ont pour effets une perte de compétitivité dans plusieurs secteurs de la production et de manière générale une baisse du dynamisme de la première économie du monde.
DEUXIEME PARTIE : L’ESPACE EUROPEEN
MILIEUX NATURELS ET POPULATIONS
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INTRODUCTION : Finistère occidental de l’Eurasie, l’Espace européen a une taille modeste de 10 millions de km2 environ (soient 6,7% des terres exondées). C’est un continent politiquement très morcelé aux côtes découpées en plusieurs péninsules. L’Europe est de manière générale comprise entre l’Océan glacial arctique et la Méditerranée, d’une part et de l’Atlantique aux monts Oural, d’autre part.
C’est une région aux milieux naturels diversifiés, cadres de vie de populations aux caractéristiques sociodémographiques originales.
I) DES MILIEUX NATURELS AUX CARACTERISTIQUES SPECIFIQUES
1) Des ensembles orographiques et structuraux très différenciés.
Les grands ensembles de relief du continent européen sont calqués sur la structure géologique. Ainsi, les grandes plaines s’étendent de la Belgique à l’Oural sur les parties effondrées du bouclier scandinave. Ce sont des plaines d’altitude et de vastes bassins sédimentaires incisés par des vallées alluviales.
De même, les massifs anciens correspondent aux plateaux granitiques (« Meseta espagnole », les massifs baltiques ou les Vosges) qui renferment des volcans éteints comme la chaine des PYS dans le Massif Central.
Par ailleurs, les chaines récentes du Tertiaire se retrouvent dans les régions méridionales du continent, en zones de contact avec les plaques tectoniques africaine et asiatique. Ce qui explique la fréquence des séismes et des volcans. Certaines unités montagneuses présentent des altitudes élevées : Mont Blanc (4807m), Caucase (5633m).
En somme, le sous sol européen offre des ressources minières et énergétiques globalement limitées. Certes, le charbon abonde mais les hydrocarbures sont faiblement représentés et très inégalement répartis (c’est ainsi que la Russie et le Nord-ouest du continent abondent en ressources naturelles). De même, les reliefs supportent des sols variés et globalement riches (sols lœssiques des plaines s’étendant de la France à la Russie) et offrent des conditions favorables à l’essor d’activités touristiques et sportives (versants montagneux enneigés).
2) Des domaines bioclimatiques essentiellement tempérés.
Tout d’abord, on distingue le domaine polaire qui occupe l’extrême Nord de la Scandinavie et de la Russie. Il est caractérisé par un froid excessif pendant toute l’année, des fleuves gelés une bonne partie de l’année, des sols à faible profondeur et gelés (permafrost) supportant une végétation de toundra arctique.
Ensuite, sur la côte occidentale, de la Norvège au Portugal, se rencontre le domaine océanique. Celui-ci est singularisé par l’humidité de son climat avec des étés frais et des hivers doux, des cours d’eau à régime irrégulier (la Garonne, la Seine, le Rhin, etc.), des sols bruns riches en humus supportant une forêt de feuillus, certains sols moins fertiles où évoluent des landes. Ce domaine est ainsi une grande zone de cultures.
Puis, à l’intérieur des terres s’étend sur des 4/5 de l’espace européen le domaine tempéré continental. Son climat est marqué par une diminution progressive des influences océaniques, la chute des quantités précipitées et la rareté des vents d’Ouest vers l’hinterland.
Les étés sont chauds alors que les hivers sont très froids du fait de la continentalité et des invasions de vents glacés en provenance de la Sibérie et du Grand Nord. Ce froid parfois excessif est source de plusieurs nuisances : victimes humaines et animales, destruction des cultures et perturbations des activités économiques. Cette région est drainée par un réseau hydrographique dense avec, entre autres, le Rhin, la Seine, la Vistule, la Volga, l’Elbe et le Dniepr. L’aménagement performant de ces fleuves fait d’eux des atouts importants aux économies des pays traversés à travers les transports qu’ils favorisent, la fourniture d’hydroélectricité et l’irrigation de vastes superficies. Ces cours d’eau sont, cependant, gelés en hiver d’où des perturbations dans la navigation. En outre, au Printemps, la fonte des glaciers est responsable d’inondations souvent dévastatrices.
Par ailleurs, le domaine continental a des paysages édaphiques et végétaux plus variés : la taïga (forêt boréale) au Nord sur des sols peu fertiles, une forêt mixte de feuillus sur des sols bruns très favorables à l’agriculture au cœur du continent et des prairies s’étendant sur des sols noirs (les plus fertiles en Europe) dans la partie Sud du domaine. Appelés tchernozem (ou tchernoziom d’Ukraine) ces sols noirs surtout consacrés à la culture du blé.
Enfin, au Sud de l’Europe, le domaine méditerranéen se singularise par des hivers doux, des étés chauds et secs mais aussi des pluies torrentielles en automne. Les ruissellements qui en découlent enlèvent les parties superficielles des sols participant à leur appauvrissement. Sols et couvert végétal sont caractérisés par leur diversité : forêt de chênes verts et de chênes lièges colonisant les versants montagneux humides, garrigue évoluant sur des sols calcaires et maquis peuplant des sols granitiques.
Bref, les données naturelles de l’espace européen offrent des avantages assez importants par l’abondance du bois, des cours d’eau et des mers, par l’extension du littoral, par la diversité des climats et des sols mais également par la présence de ressources minières et énergétiques très inégalement réparties. Ces atouts sont mis en profit par une population aux caractéristiques sociodémographiques particulières.
II) DES POPULATIONS AUX CARACTERISTIQUES ORIGINALES.
1°) Des populations multiculturelles et inégalement distribuées dans l’espace.
a) Des populations multiculturelles.
Tout d’abord, la population européenne est traditionnellement blanche. Néanmoins, elle présente une certaine diversité avec globalement trois grandes aires géoculturelles :
- Une Europe du Nord protestante et germanique ;
- Une Europe de l’Ouest et du sud catholique et latine ;
- Une Europe de l’Est orthodoxe et slave.
Cette diversité ethnoculturelle est renforcée par l’existence de minorités linguistiques ou religieuses : communautés musulmanes très présentes dans les Balkans et dans plusieurs pays comme la France, l’Espagne, l’Angleterre ou la Russie, communautés asiatiques porteuses de cultures variées, entre autres.
b) Une population inégalement répartie entre régions et entre villes et campagnes.
Les Européens, avec une population estimée à un peu plus de 700 millions d’habitants sont inégalement répartis dans l’espace alors le continent est très densément peuplés avec plus de 70 Ht/Km2.
A l’échelle régionale, l’Europe hanséatique (Nord et Nord-ouest) notamment de l’Angleterre à la Russie a des densités dépassant 200 hab. au km2. C’est une région fortement urbanisée et industrialisée et à agriculture intensive. De même, du Sud de l’Angleterre à la partie méridionale de la Russie, le peuplement est dense. A l’inverse, les régions montagneuses et les terres froides sont faiblement occupées.
Egalement, entre les villes et les campagnes, le déséquilibre est criard avec une population très urbanisée comme le montrent des taux d’urbanisation dépassant dans plusieurs régions les 70%. Les campagnes, victimes de l’exode rural depuis la révolution industrielles, sont faiblement occupées. Toutefois, l’Europe occidentale a une civilisation urbaine plus prononcée avec des taux frôlant les 80% alors qu’à l’Est, ils tournent autour de 60%. En plus, le gigantisme urbain est un fait marquant mais encore plus manifeste à l’Ouest qu’à l’Est.
2°) Des sociétés vieilles, fortement occupées par le tertiaire et confrontée à l’épineux problème de l’immigration.
a) Une vieillesse inquiétante.
Les populations européennes sont dans la phase de maturité démographique et ou d’équilibre de la prospérité. Celle-ci se manifeste, tout d’abord, par des croîts démographiques très faibles et parfois négatifs. Le taux d’accroissement moyen de 0,3% est, ainsi, extrêmement faible. Il est le résultat de comportements démographiques volontaires favorables à la limitation des naissances et donc à des familles nucléaires.
Ce choix est guidé par la recherche du bien-être individuel, le niveau élevé de la vie et de l’entretien et de l’éducation de l’enfant mais aussi et surtout par l’emploi des femmes et leur niveau d’instruction de plus en plus poussé.
Cette maturité démographique s’exprime aussi par une proportion des personnes âgées de 60 ans et plus dépassant actuellement 23% de la population européenne du fait d’une espérance de vie moyenne de plus de 70 ans (elle frôle ou dépasse 80 ans à l’Ouest et au Nord mais n’atteint pas 70 ans à l’Est). Ce « PAPY BOOM » pose de sérieux problèmes de disponibilité de main-d’œuvre, de prise en charge sociale des personnes âgées, de cotisations aux caisses de retraites et signifie un problème de renouvellement des générations.
b) Des sociétés postindustrielles.
Le taux d’activité des populations européennes est important et atteint ou dépasse presque partout 50%. Cette main d’œuvre globalement qualifiée est fortement présente dans le secteur tertiaire qui n’a cessé de se diversifier depuis la fin de la seconde guerre mondiale. En Europe occidentale plus de 70% des actifs travaillent dans ce secteur qui est également le plus grand contributeur au RIB alors qu’à l’Est il n’emploie que 50 à 60% des actifs. La part du primaire et du secondaire décline en raison de la mécanisation et la motorisation à outrance de l’agriculture mais aussi des délocalisations industrielles et de la robotisation. Ces sociétés postindustrielles sont globalement riches même si de profondes inégalités existent entre les régions, entre les pays et au sein des pays.
c) Des populations confrontées au casse-tête de l’immigration.
Depuis, la fin de la seconde guerre mondiale, l’Europe est devenue l’un des principaux bassins récepteurs de flux migratoires à la fois économiques, politiques et touristiques.
A l’intérieur du continent, on distingue des courants interrégionaux dominés par des mouvements de populations d’Europe de l’Est et du Centre en direction de l’Ouest et du Nord et pour des motivations essentiellement économiques. C’est le cas des Rom en France et dans presque toute l’Europe Occidentale. En outre, au niveau des aires métropolitaines on note un phénomène de migrations pendulaires entre les centres villes (lieux de travail) et leurs banlieues (lieux de résidence) qui est l’expression d’un retour d’une partie la population vers les zones rurales en raison des nombreuses nuisances en zone urbaines. Ce phénomène est communément appelé rurbanisation.
A l’échelle intercontinentale, l’Europe est un important foyer d’accueil de migrants pour des raisons économiques, politiques ou touristiques. Mais, les migrations de type économique et politique sont de plus en plus restrictives du fait des nombreuses difficultés socioéconomiques auxquelles font face les nations européennes et qui ont pour noms déprime économique, montée du chômage, précarisation de l’emploi, etc. Et devant l’ampleur des migrations clandestines et face aux différentes stratégies utilisées par les Asiatiques et les Africains risquant leur vie à bord d’embarcations de fortune, les gouvernements européens ont durci les lois en matière d’immigration (expulsions par charters, déploiement de moyens aériens et maritimes d’interception des embarcations de fortune utilisées par les clandestins (FRONTEX), politiques d’aides au retour des immigrés dans leurs pays d’origine, durcissement des conditions de délivrance de visas, entre autres). D’ailleurs, ces immigrés sont de plus en plus exposés à des actes de xénophobie et de racisme.
Ainsi, les populations européennes sont marquées par leur multiculturalisme, leur richesse, leur inégale répartition dans l’espace, leur forte concentration dans les villes mais également leur vieillissement inquiétant et leur entrée dans l’ère postindustrielle.
CONCLUSION : L’espace européen a une nature aux paysages géologiques, topographiques, édaphiques, phytogéographiques et hydrographiques divers et offrant globalement des potentialités favorables au développement de la région. Ces milieux constituent des cadres de vie de populations multiethniques et d’un niveau de vie parmi les plus élevés au monde. Ce sont des sociétés vieilles, fortement urbanisées et occupées par le tertiaire et de manière générale résolument engagées dans la voie de l’intégration régionale.